On ne naît pas manager, on le devient
Par Julie Zhuo
Que faire lorsque tout le monde compte sur vous pour les conduire ? Comment assumer son rôle de dirigeant même lorsque l’on estime ne pas en avoir les compétences ?
La bonne nouvelle est que si vous êtes à un poste de manager, c’est que quelqu’un a suffisamment cru en vous pour vous offrir cette opportunité. Cependant, la réalité est que la plupart des nouveaux managers se sentent dépassés et sous pression au cours de leurs premiers mois.
Heureusement, Julie Zhuo, vice-présidente du design chez Facebook, est là pour vous montrer comment faire.
S’appuyant sur sa propre expérience en tant que manager, Zhuo explique comment obtenir de bons résultats et éviter les pièges les plus courants en matière de gestion d’équipe.
Qu’il s’agisse de tenir des réunions efficaces, de recruter les personnes idéales ou de passer d’une équipe de petite taille à une équipe beaucoup plus grande, vous trouverez dans ce guide des tactiques qui feront de vous un excellent dirigeant.
Dans ce résumé, vous découvrirez
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Pourquoi votre management sera déterminé par vos 90 premiers jours de service ;
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Pourquoi les dirigeants ne devraient pas raisonner comme des pompiers ;
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Comment structurer vos réunions ;
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Et enfin comment recruter et déléguer des tâches à responsabilités.
Idée clé 1 - Être un bon manager c’est se concentrer sur les résultats de son équipe et non sur des activités.
À l’âge de 25 ans, Julie Zhuo s’est vu offrir le job de ses rêves : gérer l’équipe de conception de Facebook. Plus étonnant encore, ce rôle était le premier rôle de Zhuo en tant que Manager. Elle se jeta donc aussitôt au fond de l’eau, avant de finir par se demander :
«Qu’est-ce qu’un manager fait réellement ?»
À ses débuts en tant que manager, Zhuo pensait que son travail consistait à organiser des réunions avec les membres de l’équipe, à leur donner des directives concernant leur travail et à choisir qui parmi ses collaborateurs devait être promu ou licencié.
Cependant, elle se rendit vite compte que son approche était beaucoup trop court termiste. En effet, elle se basait beaucoup trop sur les tâches quotidiennes de base, plutôt que sur des objectifs à long terme.
Après quelques années d’expérience dans son rôle de dirigeant, Zhuo est devenue plus stratégique. Elle compris que le rôle d’un responsable était de se concentrer sur des problèmes plus vastes. Il s’agit notamment de s’assurer que son équipe travaille efficacement ensemble, d’aider les membres de l’équipe à atteindre leurs objectifs de carrière et de mettre au point des processus permettant d’améliorer l’efficacité de chacun.
En fin de compte, selon Zhuo, le travail d’un manager est d’améliorer les résultats de son équipe. En travaillant pour atteindre cet objectif, vous commencerez à voir la différence entre un bon manager et un médiocre.
De nombreuses personnes adoptent une stratégie de case à cocher pour déterminer si un manager est bon. Par exemple, ils évaluent s’ils travaillent fort, est sympathique ou capable de faire de belles présentations. La réalité est un peu complexe. En effet, seuls les résultats de l’équipe qu’ils pilotent peuvent répondre dire si oui ou non il est un bon manager.
En d’autres termes, une équipe dirigée par un bon manager obtiendra (presque) toujours de bons résultats et ce de manière constante. Alors, avant toute chose, demandez-vous quel est le résultat que cherche à atteindre votre équipe ou votre entreprise.
Si, comme Zhuo, le résultat que vous recherchez est un design époustouflant pour les utilisateurs de Facebook, rappelez-vous donc qu’une excellente équipe de managers vous proposera toujours de superbes designs, alors qu’une équipe de mauvais manager vous proposera des designs médiocres.
Un excellent manager est celui dont l’équipe obtient d’excellents résultats. C’est aussi simple que cela: nul besoin d’une longue liste de cases à cocher pour arriver à cette conclusion.
Idée clé 2 - Tous les types de management comportent des avantages et des inconvénients
L’auteur rencontra un jour des managers Facebook fraîchement installés, à qui elle demanda quels aspects de leur travail avaient-ils trouvés plus simples ou plus difficiles à gérer. Elle remarqua une tendance dans leurs réponses.
Selon elle, la manière dont ils entraient dans leur nouveau rôle de manager avait un fort impact sur le caractère simple ou difficile de leurs trois premiers mois de travail.
Il existe plusieurs façons possibles de devenir manager, et chaque voie comporte ses avantages, mais aussi ses pièges potentiels, au cours des trois premiers mois.
Tout d’abord, il y a le chemin des apprentis manager.
Le parcours de l’apprenti commence lorsque l’équipe du «grand chef» se développe et prend de l’ampleur. Celui-ci délègue ainsi la gestion d’une partie de l’équipe à l’apprenti. C’est cette voie qu’emprunta l’un des managers que questionna l’auteur. Jeune designer chez Facebook, on lui demanda de gérer une partie de l’équipe de conception alors en pleine croissance.
Un des avantages de cette voie vers le management est que vous pourrez bénéficier de beaucoup de conseils au début de votre carrière, car votre propre manager sera toujours là pour vous coacher et répondre à vos questions. Cependant, établir de bonnes relations avec les personnes qui travaillent sous vos ordres peut être délicat en tant qu’apprenti manager. Ceux-ci étant bien trop habitués à vous voir comme un des leurs, pas comme leur patron.
Il y a deuxièmement le chemin des managers pionniers.
Les pionniers créent des équipes entièrement nouvelles et sont responsables de tous les aspects de la croissance de cette équipe. L’un des principaux avantages de cette voie est que vous construisez votre équipe plutôt que d’en hériter d’une. Vous êtes parfaitement autonome et libre de construire votre équipe selon votre propre stratégie.
Vous pouvez sélectionner les personnes avec lesquelles vous souhaitez travailler et concevoir la dynamique d’équipe. En revanche, les pionniers n’ont presque jamais accès au soutien d’autres managers, en ce qui concerne leur métier.
En effet, personne ne pourrait mieux votre équipe et votre métier que vous. Vous prenez donc le risque d’être très isolé, surtout en cas de coup dur.
Enfin, il y a le chemin du nouveau patron. Dans ce scénario, vous êtes amené (par une autre équipe ou même une autre organisation) à gérer un groupe de travail établi. L’un des avantages d’être un nouveau patron est que les gens vous laisseront un peu de temps libre pendant vos premiers mois. Pourquoi ? Et bien parce qu’ils apprécieront le fait que vous soyez un débutant. Vous serez donc autorisé à faire des erreurs tout en apprenant comment tout fonctionne.
De plus, il est important que vous utilisiez ce temps pour asseoir votre leadership et apprendre. L’un des pièges que peut rencontrer un nouveau patron est de se précipiter et de changer les choses sans bien comprendre les particularités de son nouveau poste.
La compréhension de votre chemin vers le management, de ses défis et de ses avantages uniques, vous aidera à mieux prendre les devants et à exceller dans votre rôle.
Idée clé 3 - Les grands managers font des remarques pertinentes et bienveillantes
Zhuo se souvient encore des pires réactions qu’elle ait jamais reçues. En critiquant l’une de ses créations pour Facebook, une ancienne collègue lui a demandé au sujet d’un nouveau : «n’est-ce pas censé être mieux qu’avant ?»
Bien que cet exemple soit extrême, la vérité est que beaucoup d’entre nous avons du mal à faire des remarques de la bonne manière. La langue est un organe si petit et pourtant si destructeur.
«La langue est un petit membre, et elle se vante de grandes choses. Voici, comme un petit feu peut embraser une grande forêt !» Jacques Idée clé 3 verset 5 (La Bible)
Soit nous craignons de blesser quelqu’un et nous nous abstenons de toute critique, soit, comme dans le cas ci-dessus, nous ne sommes pas assez doué pour les remarques.
Néanmoins, faire des commentaires efficaces et perspicaces aux membres de votre équipe est un élément essentiel du travail de manager. Alors, comment pouvez-vous faire de bonnes remarques, tout en les rendant stimulantes pour celles ou ceux qui la reçoivent ?
De manière générale, vous devez faire des commentaires spécifiques à une tâche particulière. Une activité que quelqu’un vient de terminer par exemple. Si un membre de l’équipe vient de faire une présentation, prévoyez du temps par la suite pour lui dire ce qui s’est bien passé, selon vous, et comment il pourrait s’améliorer la prochaine fois. Les commentaires spécifiques à une activité comme celle-ci sont les plus simples.Pourquoi? Parce que cela tourne autour de ce que quelqu’un a fait, plutôt que qui il est en tant que personne.
Pour que ce type de retour soit le plus efficace possible, il est important que vous le transmettiez dès que possible afin que la tâche reste fraîche dans vos pensées. Par exemple, vous pouvez envoyer vos remarques dans un courrier électronique le jour même où la tâche s’est terminée. Et, à moins que la tâche ne soit particulièrement importante, ces réactions écrites seront aussi efficaces qu’une conversation en face à face.
Enfin, en faisant des commentaires spécifiques à une activité, les membres de votre équipe recevront en quelque sorte de petites séances de coaching après chaque tâche entreprise.
Une autre façon de faire de bons commentaires est de miser sur la synergie des membres de votre équipe. Vous pouvez y parvenir en organisant des séances de feedback à 360 degrés. Ce type de feedback prend en compte les opinions de nombreuses personnes différentes.
Par exemple, si un membre de votre équipe vient de faire une présentation, plutôt que de lui envoyer vos impressions sur la performance, vous pouvez également partager ce que les autres ont pensé. Ce type de feedback est précieux car il fournit une vue complète et objective de la performance du membre de l’équipe. Vous devez cependant l’utiliser de manière intelligente, vous ne voudriez pas qu’un membre de votre équipe se sente en concurrence avec une ou plusieurs autres personnes.
Idée clé 4 - Les bonnes réunions ont un objectif clair et aboutissent à des résultats clairs.
Dans les lieux de travail modernes, les réunions ont de plus en plus mauvaise réputation. Les réunions hebdomadaires d’équipe sont alors considérées comme terne, bureaucratique et synonymes de perte de temps.
En tant que responsable, l’auteur a assisté à de nombreuses réunions désastreuses. Le genre de réunions au cours desquelles chaque participant gémit à chaque question banale, pendant que d'autres se mettent au dessin ou regardent en l’air perdus dans leurs pensées.
Alors, comment rendre les réunions d’équipe plus productives ?
Lorsque l’auteur est devenue manager, elle pensait que la clé pour avoir de bonnes réunions était de s’assurer qu’elles avaient un but explicite. Ainsi, elle organisait une réunion hebdomadaire pour discuter de l’avancement des membres de son équipe dans leurs différents projets.
Néanmoins, même avec un but explicite (contrôler l’avancement d’un projet), son équipe trouvait toujours les réunions vagues et redondantes.
Puis un jour, quelqu’un proposa que chaque coéquipier pourrait tout aussi bien envoyer des mises à jour par courrier électronique de son avancement dans tel ou tel projet. Suite à cette Remarque, l’auteur fit tout simplement le choix d’annuler les réunions.
Elle compris qu’avoir ordre du jour n’était pas suffisant pour avoir une réunion. Vous devez vous assurer au préalable de l’intérêt d’une telle réunion. Par exemple, une réunion utile serait une où au sortir celle-ci votre équipe prendrait une décision claire.
Une réunion utile emmène à des actes utiles.
Si tel est le cas, votre réunion doit inclure certaines composantes. Il doit y avoir bien évidemment une décision à prendre à la fin, mais une telle réunion doit également inclure toutes les personnes directement touchées par cette décision.
Pendant la réunion, toutes les informations pertinentes, doivent être présentées de manière objective. En outre, toutes les recommandations de l’équipe devraient être formulées.
Enfin, votre réunion doit répartir le même temps entre différentes opinions et faire en sorte que chacun ait le sentiment que sa voix est entendue. Les responsables peuvent y contribuer en sollicitant des participants qui ne se sont pas encore exprimés pour donner leur avis. Ainsi, toutes les opinions, même divergentes, auront été proposées.
Les bonnes réunions ont un objectif clair et aboutissent à des résultats clairs également.
Idée clé 5 : Prenez de bonnes décisions de recrutement en élaborant un plan annuel
En tant que manager, l’embauche de bonnes personnes au sein de votre équipe est sûrement l’une des tâches les plus importantes de votre activité. Après plus de dix ans passés chez Facebook, l’auteur a été impliqué dans le recrutement de milliers de ses collègues.
En tant que manager, comment pouvez-vous vous assurer que vous recrutez les bonnes personnes pour votre équipe ?
Tout d’abord, s’agissant du recrutement, assurez-vous de savoir ce que vous recherchez. Trop souvent, les managers se lancent en recrutement comme s’ils s’attaquaient à un incendie. Ils voient un problème, un vide à combler et essaient de le résoudre le plus rapidement possible.
Lorsque les managers se concentrent trop sur le simple fait de pourvoir un poste vacant, ils oublient généralement de réfléchir aux compétences, aux attributs ou expériences qu’ils recherchent chez un candidat. Cela peut facilement conduire à l’embauche d’une «mauvaise personne» au sein de votre équipe.
Heureusement, vous pouvez cesser de penser comme un pompier et commencer à agir en tant que manager en planifiant.
Concrètement, au début de chaque année civile, l’auteur propose de définir les objectifs de son équipe pour les douze prochains mois. Il faut ensuite analyser toutes les lacunes en termes de compétences, toutes les expériences et les points forts de votre équipe. Vous devez également considérer les forces que votre équipe possède déjà en abondance.
Puis, réfléchissez aux forces et aux compétences dont votre équipe a davantage besoin, telles que la créativité, le savoir-faire opérationnel ou les compétences dans un domaine bien particulier.
Enfin, demandez-vous quelles personnalités, expériences précédentes ou caractéristiques pourraient renforcer la diversité de votre équipe.
Une fois ce travail effectué, il vous suffira ensuite de créer une liste de postes vacants pour lesquels pour combler ces différentes lacunes identifiées. Vous déciderez ainsi combien de nouvelles recrues vous pouvez embaucher de manière réaliste et factuelle.
Avoir un plan d’un an bien pensé vous donne un cadre utile pour évaluer l’aptitude des candidats. Cela vous permet également de ne pas simplement confier un travail à la prochaine personne disponible sur le marché de l’emploi.
Idée clé 6 : Diriger une équipe en pleine croissance nécessite de passer à la gestion indirecte.
Lorsque Julie Zhuo est devenue manager, son équipe était composée d’une poignée de designers et chaque nouvelle recrue était une source d’excitation. Dix ans plus tard, la taille de son équipe avait quadruplé. Indirectement, la croissance de son équipe a également conduit à la croissance de Zhuo en tant que manager. En effet, diriger une petite équipe est très différent de diriger une grande comme vous vous en doutez sûrement.
Par exemple, si vous ne gérez que quelques personnes, votre relation de travail sera probablement plus personnelle. Avec une petite équipe, vous pouvez saisir les détails du travail de chaque personne et comprendre ce qui l’intéresse, ses forces et même ce qu’il aime faire pendant son temps libre.
Mais lorsque votre équipe compte 30 personnes, vous ne pourrez pas les gérer directement. Du moins pas efficacement. En effet, si vous deviez rencontrer chaque personne pendant une demi-heure chaque semaine pour une conversation individuelle, vous passeriez environ la moitié de votre semaine en réunions!
Ainsi, lorsque votre équipe se développe au-delà d’un certain seuil, vous devez absolument embaucher ou promouvoir un collaborateur pour vous décharger de tous ces entretiens en tête-à-tête. De ce fait, vous gérerez votre équipe de manière plus indirecte.
Il faut noter cependant que la gestion indirecte possède ses propres inconvénients. En tant que manager général, vous serez toujours responsable du travail de votre équipe, mais vous serez également dispensé de la plupart des décisions quotidiennes à prendre. Cette perte de contrôle peut être dérangeante au début, alors ne vous inquiétez pas si cela vous prend du temps pour vous y habituer. Trouver le juste milieu entre s’attaquer soi-même à un problème et faire confiance à vos collaborateurs-managers pour le gérer.
Un autre problème lié à la gestion d’une grande équipe est que les membres de votre équipe peuvent commencer à se comporter différemment autour de vous.
Par exemple, au fur et à mesure que son équipe s’agrandissait, l’auteur a constaté que les personnes qu’elle dirigeait indirectement étaient moins disposées à contester son opinion. Ils avaient aussi du mal à lui dire lorsqu’ils n’étaient pas satisfaits de quelque chose. Lorsqu’elle demanda à l’un de ses collaborateurs directs pourquoi cela se produisait, il lui expliqua qu’ils trouvaient son ancienneté dans l’entreprise intimidante.
Plus vous déléguez des responsabilités, plus vous créez de la distante, et plus les gens vous trouveront intimidant.
Il est donc important que les responsables de grandes équipes se souviennent que, quels que soient leurs liens d’amitié, leur statut d’autorité conjugué à leur distance suite à une gestion indirecte, pourrait amener leur équipe à les considérer comme inaccessibles, voire distants.
Pour lutter contre cela, les responsables doivent préciser qu’ils sont toujours ouverts aux opinions différentes des uns et des autres et s’attacher à récompenser les personnes qui expriment leur désaccord.
Conclusion
Votre premier poste de direction comportera des opportunités et des pièges, en fonction de votre chemin vers le management.
Vous pouvez exceller en vous concentrant sur l’obtention d’excellents résultats, la mise en place de réunions d’équipe efficaces, de vos décisions d’embauche et de la délégation quand votre équipe grandit.
Imaginez un scénario dans lequel vous demandez à quatre membres de votre équipe de proposer de nouvelles idées pour rendre une application plus facile à utiliser. Vous leur dites de proposer les meilleures idées qu’ils auront, mais à la fin du mois, aucune décision n’a été prise.
C’est peut-être parce que vous n’avez pas désigné de décideur général. Lorsque vous déléguez des tâches à des groupes, assurez-vous que vous avez clairement défini qui est responsable de quoi et qui est responsable de la prise de décision.
Sinon, votre équipe passera trop de temps à débattre des meilleures idées et à essayer de se persuader les uns les autres. Si vous voulez que quelque chose soit fait, vous pouvez attribuer l’autorité à une personne, pas à un groupe.